Dead Man's Bones Album
Dead Man's Bones, avec son titre tout droit sorti d'un film d'épouvante (ou pas Dead Man's Shoes). Ode au sombre, aux cloches d'enterrements et aux rires sataniques, cette pépite raffole de tous les désirs macabres que peut se procurer un mélomane ivre d'indépendance (certes un poil poussée par moment) et de nouveautés ivres en inspiration. Quand on sait que le ratio acteur/chanteur ou pire chanteur/acteur est littéralement désastreux (non il faut admettre que Rihanna dans sa grotesque bataille navale sur écran était formidable) on peut admettre le fait d'avoir peur avant de se jeter sur l'album du meilleur acteur du moment. Toute objectivité est maintenant écartée, Gosling sillonne les écrans depuis maintenant deux ans enchaînant deux ou trois voir quatre chef d'oeuvre en un temps record. Ou pas du tout pour les récalcitrants parmi-nous. Shame on you ô mal-compris de la vie.
Aux ombres de ces tableaux noirs se révèlent parfois des surprises, des gens accomplissant des merveilles en tout genre. Loin du fardeau de l'acteur/chanteur intraçable et casse-couille sur pattes, Gosling et son pot Shields nous accompagne au cours d'une pépite de 12 chansons loin des clichés du genre. Se détachant de tous stéréotypes à l'endroit le plus improbable que l'on puisse imaginer. Celui de l'acoustique soufflant le rythme d'une batterie crasse et desséchée, des voix les plus simplistes et à l'univers sombre et gothique immortalisant alors tout de suite un style de musique qu'on avait pas effleuré depuis certaines pistes du magnifique Low Estate de 16 Horsepower.
Car si Dead Heart comme son nom l'indique est minimaliste et orgasmique via sa profondeur lyrique, la plupart des autres morceaux résonneront comme un mix étonnant de fluidité, de rythmiques ventant le talent de ces deux jeunes gens, et surtout via l'interprétation théâtrale des morceaux. Normal vous me direz, l'un d'eux est un putain d'acteur. Chantant tel un fantôme, respectant l'opéra-rock dans lequel les deux musiciens semblent s'être lancés : Dead Heart rappelle le bruit du coeur s'enraillant, My Body's a Zombie For You évoque les funérailles d'un corps dans le clappement des mains macabres, le chant d'enfants en arrière plan, les lourdeurs de la percussion, et la tristesse enraillée de Gosling. Magnifique de mélancolie, l'album continue de rayonner via sa fidélité à ce thème lourd et poussiéreux.
Question production, la merveille viendra de l'idée absolument novatrice dans lesquels les deux mélomanes se lancèrent : trois pistes de musiques, obligation de jouer tous les instruments même ceux dont ils ignorent l'usage, pas d'amplifications...Un véritable Dogme à la Vinterberg/Trier complètement hallucinant poussant à comprendre l'univers si déployé et orgasmique de cet album, rayonnant de noirceur, et sombre de vie. De ce point de vue nul sans doute que l'on lorgne du côté d'Arcade Fire et de son Funéral. En mode "sa bite et son couteau" mais au son crassouillé, bordélique, noir, mais en vain, d'une profonde sincérité, et musicalement incalculable.
Gosling réussit son pari haut la main. Comme si tout était définitivement trop simple pour lui. Car la vie semble parfois apporter des corridors de lumières à certains sujets de l'espèce humaine, Gosling en profite pour déterminer à quel point le bonhomme et son ami Zack Shield ont eu la volonté de prendre le monde (ou plus les connaisseurs, stop les enflammades) à contre-pied. Purifiés, les deux musiciens nous consacrent un album d'une audace rare. A des années lumières des productions les plus enflammées et les plus parfaites de l'ère de la musique, l'album de Dead Man's Bones est une ode à la musique funèbre d'un halloween musical vibrant aux rythmes de tambourins, de clappements de mains, de guitare sèche et souffleuses. Pari dans lequel les deux membres semblent avoir mis corps et âmes pour nous conduire vers les sentiers inconnus de la musique sauvage.