Mes-50-cercles

Mischief, Mayhem, Soap.

Vendredi 17 octobre 2014 à 15:35

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Total Recall
Mémoires Programmées
De Len Wiseman

La critique est simple. Surtout lorsque celle-ci s'acharne contre une œuvre où le réalisateur semble avoir puisé toute son énergie pour ainsi mettre au monde une œuvre personnelle. D'autant plus lorsqu'il s'agit d'un remake. Alors ne nous étalons pas sur le fait que la plupart des remakes sont de pures et simples produits commerciaux histoire d'encaisser quelques dollars de plus les studios souvent Américains. Encore cette année avec le remake du chef d'oeuvre Coréen Old Boy mis en boîte par un Spike Lee en manque d'inspiration. Par ailleurs qu'est qu'un bon remake tant qu'on y est ?

Un bon remake peut-être simplement la naissance d'un nouveau point de vue différent de l'original au sein d'une œuvre très semblable. Bien que la comparaison pure et dure entre deux œuvres lambda n'a absolument rien d'objectif : le réalisateur n'est quasiment jamais le même, le sujet traité (qui souvent dans le domaine de la SF est une critique assassine d'un fait de société) n'est peut-être plus d'actualité, ou encore l'équipe de réalisation n'a clairement rien à foutre de ce qu'elle est en train de produire. Mais est-ce une raison pour produire de la merde ?

Batman Begins de Nolan est pour le fait un remake plus qu'honorable : l'esprit gothique et absurde de Tim Burton est alors remplacé par un univers américain urbain et violent, proche de la paranoia permanente des citoyens ricains suite au 11 Septembre. Mais chaque œuvre tente à sa manière de se concentrer sur un seul et unique personnage pour y narrer de nombreuses problématiques qui aujourd'hui diffèrent. The Thing sorti en 2011 tient tout simplement de la purge et de l'assassinat cinématographique. Car non seulement en reprenant le titre identique de l'oeuvre ultime réalisée par John Carpenter en 1982, ce remake se permet de reprendre plan par plan le film original. Sans point de vue, pompant des dialogues entiers, et mettant fin à un mystère dont on se serait clairement bien passé : l'origine, la gueule, et la capacité de la chose à s'en prendre au monde entier. Préquelle absolument désastreuse, The Thing a donc sa place au cimetière des merdes cinématographiques via son entêtement à produire un film hollywoodien là où Carpenter justement catapultait son majeur face au système du grand marché ricain.

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"Hum...quel est le sens de ma vie...Je me ferai bien un krisprolls."

Bref, parlons donc de ce Totall Recall : Mémoires Programmées (pardon?) qui sent la catastrophe cinématographique. Oeuvre indémodable de Paul Verhoeven sortie en 1991, Total Recall a été pour beaucoup l'une des œuvres de science fiction les plus redoutables réalisées. D'une part pour son scénario, pointilleux au point de perdre le spe

ctateur dans une fourmilière d'informations, la mise en scène coup de point d'un Verhoeven toujours aussi bourrin, et pour son inimitable univers kitsch et second degré parfaitement dans l'air du temps. Parfait pour un remake nej ? Ouai, sauf que la plupart des producteurs magouilleux se cachent souvent la face : une machine à fric c'est parfois bien (Dark Knight pour le côté intello ou Expendables pour le nihilisme) mais c'est pas une raison pour faire n'importe bien. Quand au film de Len Wiseman, le grand n'importe quoi tient du doux euphémisme tant l’œuvre de Phillip K Dick et le matériel original semblent être dénigrés et flingués depuis l'intérieur. Autrement dit : Total Recall, le remake : Argent Facile, Bimbos et Foutage de Gueules, enquête exclusive au sein d'une purge.

Alors déjà, crevons l'abcès quitte à tuer le suspens : personne n'ira sur Mars pendant le film. (Ooooooooh => Public déçu). Pire, Colin Farrell nous décoche non pas deux, mais trois expressions faciales sur un film de plus de deux heures. Un mal pour un bien me direz-vous. Le scénario de ce nouveau Total Recall se veut clairement futuriste mais réaliste. Première erreur puisque peu de films ont cette capacité à porter un futur proche dans un réalisme urbain. En gros le spectateur comprend via un générique bordélique que tout le monde est mort (ou presque, Colin est toujours là avec ses gros sourcils) suite à une guerre chimique, et que seuls deux endroits sur terre sont des espaces vitaux pour la race humaine. Logiquement on penserait à l'Afrique qui ne semble pas tellement polluée. Mais non ces deux espaces sont le Royaume-Uni, et l’Australie. Soit respectivement le pays gouvernant, et la colonie où les humains vivent entassés.

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Le meilleur Plan du film !

Ces deux territoires sont reliés via un tunnel qui traverse la terre (du grand n'importe quoi on vous l'avez dit!) où une seule navette remplie d'ouvriers de la colonie effectue des allers-retours (le scénario a t-il été signé par un candidat de télé-réalité mal famée?) chaque jour pour y travailler aux seins d'usines produisant des robots soldats pour le compte du gouvernement. Putain mais quel est le putain de rapport avec Total Recall jusque là. Ah oui, cette colonie/tunnel sombre du derrière/royaume est gouverné par un type clairement pas gentil : Cohaagen. On voit enfin le rapport avec l’œuvre originale. Bref, l'histoire à l'instar de l’œuvre originale suit le quotidien de Douglas Quaid (Colin Farrell donc) qui est l'un de ces ouvriers dépendant du système et qui en marre de son quotidien (ça se lit dans son regard...), rêvant chaque nuit de même cauchemar avec une fille méga bandante où ils jouent aux super agents secrets. Un jour il décide d'aller chez Recall -société vendeuse de rêves et de souvenirs afin d'oublier que l'on est et vivre des aventures bien plus bandantes-. D'ailleurs sa femme et son meilleur pot lui rappellent que Recall c'est de la merde. C'est en se rendant chez eux au début de l'opération que Quaid réagit d'une étrange façon et q'une réalité éclate : Quaid ne semble pas être un ouvrier, mais bel et bien un agent secret à qui l'on a changé la mémoire.

Finalement les principaux traits de lectures sont là, quand à la relectures elle est abominable. Le principal problème de ce remake reste dans son soucis d'indépendance via l'oeuvre originale. Bien sûr on sent que Len Wiseman essaie de produire quelque chose de différent, un truc cool selon lui avec...des seins et de l'action. Le tout malgré 20 premières minutes qui s'en tirent bizarrement plutôt bien. En effet il faut souligner tout de même l'univers graphique du film qui bien que pompé ardemment sur Blade Runner s'en tire pas trop mal. Tout comme une scène de poursuite plutôt réussie bien qu'épileptique à souhaits dans son montage carabiné.

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Le regard ne trompe pas : Colin Farrell se demande ce qu'il branle là armé d'un pistolet

Plus le film avance, plus on se perd dans un registre de connerie d'une ampleur infinie. A commencer par ces insupportables clins d'oeils à l'oeuvre originale qui ne figurent ici que pour donner l'illusion d'un remake qui s'auto-détruit via son sous titre « mémoires programmés ». WTF. Il suffit de jeter un œil entre deux bouchées de son hamburger pour comprendre au bout de 5 minutes l'enjeu, le match, et la chute. Aucun suspense vous l'aurez compris. Pire, ces clins d'oeils à l'oeuvre originale plus vrais que nature : une pute à 3 seins (alors qu'aucun mutant n'est communiqué dans le film!), une goutte de sueur qui devient une larme de Jessica Biel (putaaaain mais vise le drama quoi!) ou encore la folle aux deux semaines où mister univers niquait tout à coup de shoot-gun et de cervelles sur tous les murs instead of Colin Farrell se contente de courir. Tout second degré qui faisait le bonheur des cinéphages/philes du premier opus est ici éradiqué.

L'oeuvre est ici brutalement conne, ne dérive sans cesse pour se contenter d'être une épave visuelle à la morale finale brutalisant littéralement l'oeuvre de Phillip K. Dick. Une honte ? Oh oui. De plus, Len Wiseman ne prend même pas le temps d'émettre des interrogations quand à l'histoire de Douglas Quaid. C'est simple, le suspens est tué dans l’œuf en écartant toute interrogations entre fantasmes et réalités du principal protagoniste. On savait que les blockbusters avaient tendance à simplifier les faits pour n'y apporter que malheurs et châtiments. Mais là il semblerait que Total Recall (mémoires programmées hein) obtienne le prix de la toison de merde.

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 L'acteur semble avoir attrapé le virus Cage : Cinq daubes pour un bon film.

Plus le film avance, plus c'est du grand n'importe quoi. Entre cascades vues 300 fois et interminables, rencontres inutiles (le personnage de Kuato littéralement oublié...), ou short-cut bien trop faiblards et rapides : absences donc de fantasmes/réalités qui faisaient -putaindebordeldemerde- toute l'intelligence du premier opus -à partir de là les gars...hehe-. Ou encore le personnage de Mickael Ironside effacé au détriment d'une lamentable performance de Kate Beckinsale qui semble puiser son charisme et son inspiration d'une huître malade des îles du galàpagos. Cette même Katie -tu permets Len?- qui malgré ses boobs et son fessier musclé (il faut le voir sur l'écran, c'est une méchante sportive !) semble être revenu à l'âge de pierre des performances théâtrales où les grimaces faisaient offices de personnages méchants, le plissement de sourcils des personnages contrariés...Une génocide cinématographique. Quand au pauvre Collin Farrell, ses trois expressions faciales semblent-elles plus vraies que natures puisque ce dernier semble se demander comment il en est arrivé ici (ça se lit sur son visage). Bryan Cranston justifie sa présence pour payer l'assurance santé de sa famille, et Jessica Biel pour une fois de plus sublimer sa parfaite plastique et montrer c'est qui la meuf.

Bref du grand n'importe quoi, qui visuellement s'en tire heureusement très bien il faut le reconnaître en pompant les meilleurs films de SF de ces dernières années (Minority Report pour les bagnoles, Blade Runner pour le melting-pot de la colonie...). On regarde ça tel un kamoulox, en espérant que ça ne dure pas trop longtemps car il nous reste alors peu de neurones. Quand à Len Wiseman, il semble s'éclater en demandant à sa femme de muscler ses fesses, et ne semble plus trop comprendre ce qu'il lui arrive.

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L'huître des îles du Galàpagos en pleine action :
"Fais la méchante!" cria Len sur le plateau à sa petite et douce Kate
 

Bref et merde j'abandonne. Total Recall : Mémoires Programmées est un chef d'oeuvre à condition que l'on ne critique pas une œuvre via son scénario, ses performances, son univers, ses tournures, sa réalisation, sa production (même l'affiche a un problème). Bref si la critique n'existait pas. Mais il faut reconnaître que l'art de critiquer est simple. Surtout dans un cas pareil. 


Mardi 14 octobre 2014 à 12:39


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Memories Of Murder
de Bong Joon-ho


Il est simple d'appuyer le fait que le cinéma Coréen est un art la plupart du temps violent, tranchant, sanglant. Il serait tout aussi simple d'appuyer le fait que leur cinéma peut-être à ce jour considéré comme l'un des plus poignants et dramatiques dans la matière fécale que devient parfois le cinéma de nos jours. Cette nouvelle vague (lancée via la trilogie de la vengeance d'un Park Chan Wook plus timbré que jamais) est certainement l'un des faits les plus marquants en matière de cinéma depuis le début du 21ème siècle. Pour l'audace et le réalisme, pour la violence à chaque instant sublimée, ou bien encore pour l'aura cinéphile que chacun de ces films possède. 

Memories of murder semble lorgner plus dans la catégorie des films sociaux asiatiques, tel A Touch Of Sin sorti en 2013. Dans lequel deux enquêteurs que tout diffère : l'un vient de la ville avec une puissance intellectuelle BAC+4, l'autre n'a connu que les rizières et les terrains boueux d'une Corée retranchée rarement aperçue de cette manière auparavant. Certain comprendront le bouseux et le citadin, d'autres la rencontre entre deux cultures différentes au sein d'un unique pays. La base de Memories Of Murder prend forme autour d'une série de meurtres sans réponse dans la Corée des années 80 où les karaokés enflamment le samedi soir, et que les couvres feux de plus en plus importants semblent terroriser la population locale.

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Bong Joon-ho demeure aujourd'hui l'une des pièces phares du 7ème art Coréen en partie grâce à ce film qui alimenta la même année que Old Boy, la reconnaissance mondiale d'un cinéma explorant des thématiques semblables aux films Européens mais sous l'influence de la culture de son pays. C'est sous un ton de petit polar ersazt et modeste que Bong Joon-ho démarre Memories Of Murder. C'est d'ailleurs avec un ton résolument noir et burlesque que le film commence là où l'ombre d'un film Américain aurait pu peser, Bong Jong-oh décide à sa manière d'explorer le film comme une oeuvre d'une cruauté rare, aux relents absurdes, aux personnages pathétiques.

Tant qu'à alimenter son film dans une subtile narration, le réalisateur place en avant la confrontation de ces deux inspecteurs que tout sépare, bien que vivant dans une seule partie de la Corée. Les faits, les réactions, les gestes, les paroles ou même le goût pour la nourriture. Bong Joon-oh tire alors une véritable satire sociale de ces années 80 où le pays était en totale recherche d'identité tout comme laisse présager les principaux protagonistes de l'histoire. Une métaphore sublimant chaque bobines dramatiques, où les acteurs se donnent à corps et âmes. C'est alors que le réalisateur dynamite la moindre erreur qu'à pu causer la terrible chute de cette histoire tirée de faits réels. Et cet dans cet élan à la fois réactionnaire et timide que le film prend toute son ampleur littéraire.

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Car preuve ultime de la précocité du cinéma Coréen et surtout de Memories Of Murder, Bong Joon-oh ne prend à vrai dire jamais son spectateur pour un méchant débile. Prouvant que l'ambiance glaçante, sordide et monstrueuse du film peut-être contre balancée par une ironie dévoilant à la fois la nature propres des personnages (le flic de campagne se prend pour le flic de ville). Ceci pour alimenter en réalisme ce cinéma de pur génie comme en témoigne un exceptionnel plan séquence dans un karaoké. Chose parfaitement accomplie par Joon-oh qui signa en 2013 le magnifique Transperce-Neige où les codes de la Science-Fiction sont alors repris avec la même recette. On ne s'étendra pas tellement (bien que avant-gardistes d'un genre, nous sommes en 2003) sur les photographies, lumières, musiques, ou directions artistiques, car la notoriété des Coréens là dessus n'est plus à redire. L'ensemble est simplement parfait, sublimant et illuminant chaque noirceur du récit.

C'est avec cette faculté à piocher les principaux codes du cinéma de genre dans le but de les adapter à son univers déplacé que Joon-oh tourne cet incroyable Memories Of Murder. A la fois compris comme un cris de rage dans une époque où son pays était au bord du gouffre, et comme un grand film policier, Memories Of Murder possède ces rares puissances littéraires, dramatiques et tragiques vues au cinéma ces dernières années. Puissances rassemblées dans une séquence où le mutisme des personnages prend tout son sens. Mais en y réfléchissant c'est peut-être aussi et tout simplement que le cinéma de Joon-oh est incontestablement un cinéma transpirant la cinéphilie.

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