Twixt de Francis Ford Coppola
Forcément quand on oscille sans cesse entre le B et le Z, on s'y perd. Coppola aurait presque pu le savoir à ses dépens si le 5ème dieu du 7ème art ne s'était pas attelé doucement et longuement à la tâche. Car depuis que le vieil homme ne décide plus que de faire tourner sa famille (à la limite ses vieux amis), au sein du domaine familial (sa sent presque l'inceste!) pour des budgets "presque" riquiqui quand on sait que l'homme est peut être à l'origine de la crise mondiale avec ses tournages de 3 ans, l'homme sage prend donc le temps de tout planifier. Quitte à maquiller des ultras bides commerciaux en films auteurisants à la bonne franquette. C'était le cas avec Tetro où le maitre se justifiait "Si j'ai envie de dépenser 10 millions de Dollars pour réaliser le film que je voulais faire, je le fais." La définition de l'attitude Rock'n'roll par excellence.
Passons donc ce manque d'extériorisation catégorique, car Twixt est avant tout un film de seconde zone, ou tout du moins y ressemble. Sincère, peut être, mais qui dans la lignée des autres films du genre Policier-Gothique-Suicides toi- reste un film de genre avec tout les codes qui vont avec. Sauf que Coppola reste tout de même le créateur de quelques une des peloches les plus importantes du 7ème art (Pour les incultes, Conversation Secrète, Apocalypse Now, Le Parrain I et II). Oublions son passage au 3D misérable qui relève de l'arnaque mondiale (Twixt possède deux scènes en 3D), Coppola possède donc quelques armes pour réaliser un film...qui ne lui ressemble pas. Mais pour autant, ne crache pas sur la sincérité absolue qu'accorde le réalisateur à l'oeuvre qu'il a écrite entre poésie, fantasmes gotiques et intrigue policière plongée dans l'Amérique rurale.
Grâce à tout cet enthousiasme et cet entâchement pour réaliser ce film "dont il a toujours voulu voir le jour", Coppola fait naitre de Twixt une certaine générosité à l'égard du cinéma d'un temps qui le touche particulièrement. D'où cette multitude de facettes qui se retrouve dans cette histoire lambda d'un écrivain de seconde zone à la recherche d'un véritable succès littéraire d'une étrange bourgade rase motte Américaine. On retrouve aussi bien la paranoïa narrative d'un David Lynch ou Lars Von Trier (essentiellement le premier avec le mémorable Blue Velvet) avec l'obsédante narration d'un Tom Waits plus flippant que jamais, aussi bien que le gothique de la Hammer que Coppola a un peu envouté de ses charmes avec Dracula, ou encore l'univers (du) fantastique avec Big Johnny John Carpenter (Fog, ou encore et surtout L'Antre de la Folie).
Coppola scinde alors son film en différents volets, même si deux sont notables, le film subit différents niveaux de lecture, qui à l'instar du protagoniste principal finisse par nous complexifier la compréhension totale de l'histoire. Tout comme le twist end (bluffant / foutraque / osé) qui révèle du foutage de gueule ou simplement d'un Coppola qui trop longtemps muselé dans un cinéma trop noble préfère s'attarder (comprenez s'énerver) sur d'autres plans. Essentiellement sur des sujets aussi sensibles que la perte d'un être cher (qui pour le coup nous offre malheureusement une scène en toc très cul-cul la praline), ou en s'aventurant au sein même de la série B maternelle où bon nombre de clichés nous sont offerts. A deux doigts de se casser la gueule dans ce périlleux pari qui semble tout droit immergé de la maitrise peut être trop arrogante de ce fantastique metteur en scène.
La poésie aussi, en incorporant des personnages aussi intéressants que Edgar Allan Poe, exploitant aussi les fantasmes de la Z grande époque (outrance gore de la scène finale). Ce qui finit par jouer des tours au maitre, essentiellement dans la narration (trames menant à rien), ou surtout dans la photographie parfois relativement laide des rêves, ou le montage très "familial" du coup de Coppola. Ne serais ce que certains plans, passant du coq à l'âne, rappelant les cadrages d'un Ed Wood à deux reprises ou sur-plomblant son film de magnifiques prises de vues. Aussi étrange que l'histoire que raconte le film finalement. Val Kilmer quand à lui est parfait, comme à son habitude, ne craignant ni parfois la comédie, ou l'émotion brute du père de famille mortellement touché.
Twixt est donc un travail de petite ampleur pour un Coppola qui à force de s'être entaché dans des chef d'oeuvres finit par réaliser les petits films sympathiques qu'il défend d'arrache pied. Loin se situe la décadence de l'univers monétaire d'Hollywood auquel Coppola ne fait plus attention depuis un petit moment. Twixt plait donc sur certains plans, même si l'anarchie n'est jamais loin, et l'ensemble bordélique non plus quoique trop rare pour ne pas être cité et surtout à un tel niveau de maitrise cinématographique. Quand au point bonus revient à Elle Fanning, ravissante qui après le très moutchou et décevant Super 8 continue d'y croire par son aura assez remarquable pour le cinéma. Good Luck.