Mes-50-cercles

Mischief, Mayhem, Soap.

Jeudi 16 janvier 2014 à 17:53

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John Dies At The End de Don Coscarelli

 

On cherche tous à posséder une bonne excuse pour prendre de la drogue. Qu'elle forme soit-elle, l'amour, la musique, les produits. Surtout les produits. Très généralement orchestrés de dynamite par le commun des mortels, elle sert d'inspiration à de nombreux musiciens maintenant pour la plupart perchés non loin de St-Pierre, ou sur un bout de lune. David Wong admet quand à lui que celle-ci permettrait de sauver le monde. Non pas que la prise de substance illicite soit remarquable pour sauver les peuples les plus démunis ou contrer la crise et emmerder les banquiers de la planète. Non. Selon David Wong, la drogue ouvre des portes vers l'inconscience la plus extrême possible. Loin de tout aspect physique, mais au gré des dimensions parallèles non visible par ce même commun des mortels.

En gros, nous sommes attaqués par des monstres, prenez de la drogue pour les voir.

C'est sous cette dynamique que né en 2007 le roman John Dies at The End. Publié sous forme de feuilletons de l'arrache sur un site internet, la mini-série prend alors les chemins de l'édition sous l'été 2008. A ce même moment, Don Coscarelli, cinéaste sous-estimé et indépendant (comprenez, « ne pas me faire chier, je fais ce que je veux. #jepisseàlaraiedhollywood ») se voit télécharger le bouquin au hasard sur Amazon. Jackpot pour 10$, Coscarelli achète les droits dans la même soirée où il finit le livre. Son auteur : David Wong. Subtile mise en abîme du personnage principal du livre se cachant son nom sous celui du caractère. Sacré Dave.

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John Dies At The End est un livre à part. Ce qui invoque un film ailleurs. Éloigné de toutes linéarités communes et radicalement fiévreuses, son aventure semi comique/horrifique prend les traits de David Wong. Un type à la ramasse qui ne comprend pas ce qui se passe au jour le jour. Le malheureux et son meilleur ami John (un type de loin plus perché que David) sont alors confrontés (non pas de force mais de gré pour l'un d'eux) à la Joy Sauce. Source de délire optique et visuel, et de contemplation de grillages ferroviaires. Soit la drogue la plus puissante jamais réalisée, ouvrant des tunnels vers l’exploitation de dimensions parallèles dont les deux geeks sont alors immortalisés comme étant les sauveurs de ces mondes perchés à l'instar de leurs aînés. Sans le savoir, et sans le vouloir, voilà les nouveaux Bruce Willis du pauvre sauveurs du monde.

Quoi de plus simple après un coup de seringue ?

Dans cette optique, Don Coscarelli y voit un film dont il serait presque impossible de parler tant le sujet est disloqué, et que la narration du roman est oblique. Réalisateur du chef d'oeuvre le plus certainement ignoré de ces 15 dernières années - magnifique Bubba HoTep – Don Coscarelli réalise un film entre Une Nuit en Enfer et Human Traffic. Prônant le fantastique à l'absurde, le comique à l'horreur sanguinolente. Véritable jouissance artistique pendant 1h30, John Dies At The End (mis à part spoilé la fin dès le titre) part en vrille continuellement. Et c'est une réussite totale, dont peu auraient parié sur la nature finale du produit.

Explications droguées...détaillées.

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Tout d'abord l'exploitation de l'inconscience dont fait preuve Coscarelli, honorant jusqu'au dernier détails les volontés de Wong (poignet de porte en forme de sexe, ou la chute finale absurde et hallucinante). La mise en scène de Coscarelli, détaillée et s'adaptant aux prises de drogue, est sans doute l'un des excellents points de John Dies At The End. Ne prenant jamais de parti sur les effets de la drogue (en aval) Coscarelli se contrefout de cette démagogie embarrassante pour ainsi n'extirper que de dialogues complètement décalés et surprenants au possible. Shooté à la steady-cam la plupart du temps, le spectateur est alors immédiatement transporté (au sens propre et figuré) dans ce western horrifique jamais très éloigné de Fantômes contre Fantômes (en mieux, désolé Peter...)

Endossé par deux brillants acteurs que malheureusement nous ne serons pas prêt de revoir, John Dies At The End assume tous ses côtés cheaps et low : monstre fait de saucisses en animatronique, nihilisme profond du sujet, dialogue absurdes et relativement cons mais profonds, effets spéciaux méga cheaps et beauf..Le retour en grâce de Don Coscarelli fait plaisir, et promet une suite de Bubba Ho-Tep méchamment bandante à la jouissance des premières fois. Car John Dies at The End ne s'arrête pas au simple fait qu'il soit nihiliste de bout en bout. Le film peut s'apparenter à une énorme prise de confiance de deux attardés de la vie cachant un mal-être. Coscarelli prend le bon choix de ne pas s'attarder tant de temps sur ce sujet pour se déchaîner dans une déferlante d'idées toutes les plus abusives qu'inventives.

De quoi plaire à un lecteur de Mad Movies, de quoi emmerder un lecteur des Cahiers du c[hi]énima, telle est la vie, tel est le cinéma. Et lorsque le cinéma prend cette forme, c'est dans mon pontalon (et peut-être le vôtre) que l'apocalypse se joue et se dénoue...Hum.

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Mercredi 15 janvier 2014 à 14:45

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Dig ! de Ondi Timoner

L'essence du Rock des années 90 est souvent présentée par de divers groupes aux styles variés au possible qui ont tous plus ou moins implosés ou explosés au sein de ce nouveau choc musical. Nirvana, Rage Against The Machine, Soundgarden, Noir Désir, NIN, Bloody Valentine et Indochine. Non je déconne. Bref pour les plus connus et chanceux d'entre eux. D'autre ont forcé le destin -"trop intelligent pour être célèbre" comme dirait Jonathan Poneman fondateur de SUB POP, immense label indépendant et ex-fouteurs de merde qui berça du fond des chiottes Green River pour en faire l'immense Mudhoney. Dans ce style on pourrait citer Les Thugs bien sûr avant toutes choses. Mais aussi un groupe clairement venu d'ailleurs et outrancier au possible : The Brian Jonestown Massacre.

A l'instar de son nom improbable (né d'un mix de Brian Jones des Stones et du massacre de Jonestown), le groupe est l'essence même de la musique moderne. D'une maturité et d'un éclectisme beaucoup trop rare : les Stones Roses, Black Rebel Motorcycle Club, Bob Dylan, Love et les Blackbyrds filtrent avec cette identité unique qui font aujourd'hui les BJM un des groupes les plus...reconnus mais inconnu du grand public. Dig ! de Ondi Timoner (oui car venons en un moment) en montre toutes les facettes, les plus blanches, comme les plus cradingues et écoeurantes de ce groupe de perchés. Littéralement perchés sur la lune, pieds pataugeant dans la cocaine et les seringues tremblotantes. Une descente aux enfers tandis qu'un autre groupe de musique -leur meilleur bande de pots- commence à s'envoler pour le nirvana de la réussite artistique et commerciale. Leur nom : The Dandy Wahrols

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Dig ! est donc l'oeuvre de six années de deux bandes de pots, de jalousies, de gestes et de paroles irréversibles, d'attitudes rock'n'roll mais malfaisantes, de musiques, et surtout d'une reconnaissance éternelle malgré les maux et les mots. Dig ! est l'essence du rock même, une véritable fresque à base de dopes, de notes et de coups au cours d'une palpitante odyssée d'un groupe aujourd'hui mondialement reconnu et de la plongée préméditée d'une autre bande de pots. Anton Newcombe est ce génie impopulaire des BJM. Courtney Taylor est ce branleur reconnu et talentueux compositeur des Wahrols. A travers les années le spectateur est ainsi embarqué dans cette "révolution musicale" qu'Anton Newcombe laisse entendre dès les trente premières minutes du reportage. Deux groupes d'amis souhaitant embarquer l'essence du rock pour réaliser ce que personne n'avait fait depuis les Beatles et les Stones. Et au final un duel à la Blur-Oasis ? La réalité est toute autre et unique.

Paroles de Junkie ou pas, Dig ! tire rapidement un trait sur la prise de point de vue. D'une part via le génie d'Ondi Timoner, ne focalisant non pas son film sur la réussite de Wahrols pour laisser imaginer que Newcombe se drogue et salope sa carrière par jalousie et détresse. Le point de vue est ainsi d'une objectivité rare via la voix de Courtney Taylor, narrateur du film, où pourtant les Wahrols sont les derniers innocents de la planète selon les paroles des membres de BJM et la caméra de Timoner. Une déchirance musicale et amicale durant laquelle la caméra de Timoner virevolte aux quatre coins du mondes, des premières arnaques frauduleuses réalisées aux Dandy Wahrols, aux concerts foireux et détraqués de BJM, bastons de bourrés, aux rails de cocaine larmoyant sur les tables basses, aux festivals du monde entier, aux concerts devant 10 alcooliques communistes. Un documentaire à la trajectoire finale proprement hallucinante.

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Filmant les plus mauvaises heures des BJM comme un Natural Born Killers (Tueurs Nés), alternant plans de Go-Pro précurseurs, noir et blanc, filtres 16mm ou Super 8 ou de couleurs nauséabondes. Il semble par ailleurs que la réalisatrice semble s'être faite effacer de l'entourage depuis la sortie du film. Ultime facette utopique de deux rockeurs branleurs coincés dans deux époques différentes (les deux meneurs sont tout simplement d'immenses grandes gueules clamant leurs génies haut et fort. Et surtout celui de leur rival par dessus-tout...), c'est surtout Anton Newcombe qui est filmé sous toutes ses coutures. Ses pétages de câbles, ses bastons, son physique se dégradant, et cette volonté de vouloir être l'indépendance en chair et os.

Indépendance incroyablement capturée mais aussi porteuse des malaises les plus malpropres d'une vie d'humaine lambda. Indépendance qui finira toujours par se comparer paradoxalement aux Dandy Wahrols. En d'autres termes Dig ! est un immense reportage sur l'amitié, la rupture, la haine, la semi-mort, et la rédemption. Un film de rock oui, un film rock, oui aussi, un grand témoignage d'une époque et d'une idéologie réellement utopique.

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